La trappe aux espérances
Publié le 13/03/2023
De plus en plus de jeunes et de plus en plus tôt rêvent de devenir pros, rêves nourris et entretenus le plus souvent par les parents qui aspirent à être pros par procuration. “il sera pharmacien parce que papa ne l’était pas” chantait Brel, vie par procuration déjà, bien que plus modeste. Rêves entretenus aussi par des éducateurs sans vergogne qui n’ont d’éducateurs que le nom, par des pseudos agents qui ratissent en tout sens même dans les lieux les plus désertiques. Ainsi dès l’âge de 10, 11 ans, on promet monts et merveilles à des jeunes et à des parents qui n’attendent et n’entendent que ça, on multiplie les démarches pour des transferts vers ces clubs plus huppés : mercatos d’hiver, mercatos d’été, changements de clubs d’une saison à l’autre, voire en cours de saison.
Le miroir aux alouettes
Rêves démesurés, déplacés, dangereux même. D’abord on ne peut pas savoir à 11, 12 ans ce que vaudra le jeune plus tard. Notre expérience nous dit qu’on ne peut pas envisager sérieusement l’avenir d’un jeune au plus haut niveau avant 15 ans, et sans aucune certitude d’ailleurs. De tous les gamins de 11, 12 ans très doués, seul un petit nombre peut encore à 15 ans espérer atteindre les sommets. La sélection pour entrer dans un centre de formation est très rude, la concurrence acharnée et des pensionnaires d’un centre de formation 2% seulement signent un contrat pro, nous disent les dernières statistiques. La chance pour devenir professionnel est donc voisine de zéro. Les éducateurs et les parents doivent garder en tête ces chiffres et ces réalités pour éviter tout propos illusoire, voire délirant, en tout cas dangereux et éviter de tout miser sur le football. On rétorquera “celui qui veut peut”. Cet adage est faux pour l’élite la plus élevée, pour les tâches les plus difficiles. Sans doute est-il plus vrai d’inverser la formule ” celui qui peut veut” car la capacité augmente la motivation, encore que là encore cela ne soit pas suffisant. Le rêve de devenir pro est une trappe à espérances qui fonctionne à plein régime et qui s’avère particulièrement dangereuse, trappe tendue par les médias, par les parents, par les éducateurs, parfois haut placés, qui y trouvent souvent un intérêt ou un prestige personnels au détriment de l’intérêt des jeunes.
Priorité à donner aux études
La priorité pour nos jeunes footballeurs doit donc être donnée aux études. Leurs chances de réussite y sont bien plus élevées et ils pourront y trouver une voie d’épanouissement et de réussite à la condition d’en avoir conscience et de fournir les efforts nécessaires. Cette priorité donnée aux études ne les empêche pas du tout de s’adonner avec passion et intensité au football, de s’y construire et de s’y épanouir et s’ils en ont la capacité et la volonté d’envisager le plus haut niveau. Le rôle des adultes, des parents, des proches est de rappeler constamment ces évidences. C’est ce qui est fait dans nos sections sportives où la priorité est donnée aux études. Nous sommes aussi fiers de la réussite socio-professionnelle de l’immense majorité des élèves de la section de Miramont que des quelques pros issus de la section. D’ailleurs Anthony Rouault et Jim Alevinah qui se sont rencontrés dimanche dernier lors du match TFC/Clermont sont bacheliers, preuve qu’ils n’ont pas négligé leurs études et que ces études ne les ont pas empêchés de passer pro.
Oui, il faut le répéter, car c’est la réalité, les chances de devenir pro pour un jeune sont proches de zéro. On se doit de lui offrir les meilleures conditions pour qu’il puisse pratiquer son sport favori, s’y améliorer et s’y accomplir mais ne jamais oublier qu’à cet âge ce sont les études qui déterminent l’avenir du jeune.
JF Labourdette. Président de la commission technique